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LANCIA ARDENNES 1937

RESTAURATION MOTEUR

 

Le moteur fait sans nul doute partie des importantes innovations techniques qui ont souvent conduit à qualifier l'Ardennes de "voiture d'ingénieurs".

 

Avec ses 4 cylindres montés en V très refermé, celui ci est en effet à lui seul une curiosité, que ce soit à sa sortie en 1937 ou de nos jours !

D'une cylindrée de 1352cc, il développe 48ch din.

Le bloc moteur est en aluminium, avec des chemises humides non amovibles, et une culasse fonte.

Si le vilebrequin est monté de manière classique sur 3 paliers régulés, on trouve en revanche des bielles en duralumin montés directement sur le vilebrequin, sans coussinets ni régule !

L'arbre à cames, placé tout en haut, n'est pas monté en tête "mais presque", puisque les soupapes sont commandées par des culbuteurs actionnés directement par l'arbre à cames, sans tiges ni poussoirs.

 

 

Démontage et état des lieux :

 

Le moteur est bloqué, et vide d'huile.

C'est évidemment assez mauvais signe sur ce que nous allons trouver à l'intérieur...

Il est extrait du compartiment moteur, et posé sur l'établi avec sa boite de vitesses.

L'ensemble est très compact et sa légèreté surprend.

 

Notons au passage l'étonnant circuit de refroidissement: le radiateur est percé en son centre et traversé par la dynamo, avec l'hélice de refroidissement montée en bout d'axe.

La pompe à eau est quant à elle installée en bas du radiateur, fixée sur la boite à eau inférieure. Elle est ici détruite, la poulie étant manquante suite à la casse du roulement.

Nous avons trouvé le moteur avec une courroie montée directement entre la poulie de vilebrequin et la dynamo...sans pompe à eau donc !

Croisons les doigts pour qu'un refroidissement suffisant se soit effectué par thermosyphon, sans quoi il y a fort à parier que nous allons trouver de gros défauts dûs à des surchauffes.

Notons aussi que le circuit est totalement colmaté, ce qui ne fait qu'accroitre notre inquiétude.

 

Le démontage du moteur à proprement parler débute par le cache culbuteurs.

Il cache une culbuterie très encrassée, mais nous préférons très largement décourvir des pièces sales et grasses, qu'un ensemble complètement sec et rouillé !

Ce n'est pas agréable à démonter, mais c'est en général l'assurance de pièces en bon état.

Il y a donc un espoir que les soupapes et les guides soient en état correct, nous les démonterons ultérieurement.

La distribution, à chaine, semble en bon état.

Malheureusement, nous découvrons un arbre à cames très usé, une retaille ou une pièce neuve sera indispensable.

 

La culasse est déposée.

Nous découvrons ainsi les 4 pistons, et notons immédiatement que l'un d'entre eux est différent des autres...ce moteur a donc déjà "subi" une réparation de fortune.

Les cylindres ne sont pas corrodés, mais relativement usés et surtout marqués par des rayures.

Le joint du culasse ôté, nous constatons que le fond du bloc moteur est recouvert de deux bons centimètres de "boue", résidus de calcaire et autres amalgames de liquide de refroidissement.

En manipulant le volant moteur, toute rotation est toujours impossible, il y a donc fort à craindre que l'embiellage soit grippé.

 

Le carter d'huile est déposé. Réparé en plusieurs endroits, il présente une fissure "bizarre".

Nous devrons déterminer si c'est une cassure par laquelle l'huile s'est échappée (rappelons que nous avons trouvé le moteur vide d'huile), ou si c'est une simle trace de fonderie.

 

Nous découvrons l'embiellage et nos craintes se concrétisent.

Sans huile, le bas moteur a été attaqué par l'humidité, et les chapeaux de paliers et de bielles laissent apparaitre un vilebrequin très corrodé.

Tous les paliers, sans exception, sont fortement attaqués.

Nous savons donc déjà qu'une rectification importante est à prévoir....avec un cas de conscience au niveau des bielles en duralumin, puisque celles ci sont montées sans coussinets...nous y reviendrons.

 

Les ensembles bielles/pistons sont extraits.

L'un des pistons est différent des autres, et l'embase de la chemise correspondante est ébréchée.

 

 

Conclusion:

Le moteur est à présent entièrement démonté sur l'établi.

Son état, que nous qualifierons sobrement de "préoccupant", ne nécessite pas de prendre plus de mesures précises tant les travaux à effectuer sont une évidence:

- Le vilebrequin est à rectifier. Après cette opération, il nous faudra refaire le régulage des trois paliers

- Les bielles nécessitent de trouver une solution: montées en direct sur le vilebrequin à l'origine, ceci ne sera bien entendu plus envisageable une fois le vilebrequin rectifié (et donc diminué en diamètre).

Nous allons donc devoir être inventifs !

- Les chemises, trop usées, sont hors service. Les pistons, dépareillés, ne peuvent pas être conservés.

Là aussi, il faudra une solution radicale, soit de réalésage des chemises et fabrication de pistons sur mesure en surcote, soit un remplacement pur et simple...sachant que les chemises ne sont pas prévues pour être démontées, et que l'on ne trouve pas ce genre de pièces facilement.

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Travaux de rectification, remontage:

 

Chemises et pistons:

Les travaux de réfection débutent par l'ensemble chemises/pistons.

C'est la partie a priori la plus inquiétante, d'une part du fait que les chemises sont emmanchées en force dans le bloc moteur et non prévues pour être démontées, d'autre part parce qu'il est indispensable d'en trouver un autre jeu.

Celles ci étant en effet cassées au niveau de leur embase, vraisemblablement par une tentative d'extraction par le passé, il est impossible de les réaléser simplement et de monter des pistons en surcote sur mesure.

Fort heureusement, un spécialiste Italien parvient à nous fournir 4 chemises neuves ! Ces chemises sont à considérer comme des ébauches plutôt que des pièces prêtes à l'emploi, leur mise en place en force dans le bloc provoquant trop de contraintes, sources d'ovalisation.

 

Nous procédons donc à l'extraction des anciennes chemises...qui contre toute attente se laissent démonter de manière relativement aisée. Le bloc moteur aura tout de même été chauffé au préalable, et chaque chemise refroidie, opération à répéter quatre fois. Mais nous nous attendions à devoir épuiser chaque chemise par usinage au tour, ce qui aurait été bien plus fastidieux.

Les chemises neuves sont alors insérées dans le bloc moteur selon le même principe: bloc moteur chauffé, chemises refroidies.

La difficulté consite à positionner angulairement les chemises de manière très précises, puisque celles ci sont biseautées au niveau du plan de joint.

Un contrôle révèle alors que, suite au montage, une ovalisation variant entre 6 et 8 centièmes est présente.

Les quatre chemises sont donc réalésées, et des pistons neufs en surcote seront utilisés.

 

Une fois les quatre chemises en place, un surfaçage est effectué afin d'obtenir un plan de joint parfait avec la culasse.

Une peinture est appliquée à l'intérieur, afin de faciliter la circulation et d'éviter les dépôts.

 

Embiellage:

Le vilebrequin, très corrodé, est rectifié.

La ligne d'arbre étant constituée de trois paliers régulés, le régulage de chaque palier est effectué en tenant compte de la nouvelle cote du vilebrequin.

Notons que le palier central comporte deux "oreilles" servant de calage latéral du vilebrequin.

Détruites sur le palier trouvé au démontage, ces oreilles sont reconstituées et leur épaisseur est définie afin d'obtenir un jeu correct.

 

Comme nous l'avons expliqué plus haut, les bielles sont en duralumin, et montées en direct sur le vilebrequin, sans régule ni coussinets.

Cela pose donc un réel problème puisque, entre l'usure des bielles et la nouvelle cote du vilebrequin qui vient d'être rectifié...nous avons un jeu conséquent à combler.

La décision est prise de modifier les bielles afin d'y adapter des coussinets minces "modernes".

Les chapeaux sont donc montés et serrés au couple sur chaque bielle, le logement alésé, et un coussinet de véhicule récent adapté.

Osons nous vous en révéler la provenance ? Mitsubishi...

 

Equilibrage:

Avant d'équiper chaque bielle de son piston, nous nous assurons que la masse des pistons neufs est identique aux anciens. Quelques grammes les séparent, mais c'est tout à fait acceptable et dans les tolérances, nous ne ferons donc pas de reprise.

 

Notons que l'équilibrage d'un moteur en V est très délicat.

En effet, à la différence d'un moteur en ligne, dont le vilebrequin est exempt de tout balourd en équilibrage dynamique, un vilebrequin de moteur en V comporte des masses de compensation, destinées à prendre en compte le fait que les efforts provenant des cylindres ne se font pas dans la même plan.

Il est donc normal qu'un vilebrequin de moteur en V ne soit pas équilibré, et il ne faut pas y retoucher.

En revanche, il est évidemment très important d'appairer les quatre équipages mobiles, et de s'assurer, quand on remplace les pistons, que les pistons neufs utilisés ont la même masse que les anciens, le constructeur ayant utilisé ceux ci comme référence pour établir la valeur des masses de compensation.

L'embiellage peut alors être remonté, les chapeaux de bielles et paliers serrés au couple et goupillés.

 

Culasse:

Après ces "émotions" au niveau du bloc et de l'embiellage, les travaux sur la culasse nous ramènent dans le domaine du classique, ouf !

Les guides de soupapes sont très usés, nous les remplaçons donc, par des modèles issus d'un véhicule bien plus récent, aux côtes compatibles moyennant quelques reprises.

Les sièges de soupapes sont en état correct, et simplement rectifiés.

Nous en profitons pour rappeler que nous préconisons de privilégier une rectification à un rôdage à l'ancienne, les machines outil ont évolué et permettent d'obtenir un travail parfait à un coût très raisonnable (voir ici les détails techniques).

Les ressorts de soupapes, doubles à l'origine, sont trop endommagés, et certains cassés.

Nous les remplaçons donc, là aussi par des ressorts issus d'un véhicule plus récent, dont les caractéristiques en terme de tarage et de longueur sont identiques.

 

 

Les travaux de rectification sont terminés, le moteur est exposé lors du salon Epoqu'auto de Lyon.

 

 

 

 

 

 

Il n'y a à présent "plus qu'à" faire l'assemblage final des différents sous ensembles.

Nous commençons logiquement par le bas moteur.

 

 

 

Le remontage de la canalisation de graissage de l'embiellage est effectué, et du clapet de décharge.

Le bille de ce dernier étant très corrodée et à l'évidence impossible à réutiliser en l'état, nous la remplaçons par une bille en bon état.

 

 

 

Le carter d'huile, nettoyé, est muni de sa crépine avant d'être reposé sur le bloc moteur.

La pompe à huile, qui a la particularité d'être fixée de manière externe au carter d'huile, est recondtionnée.

 

 

 

Le bloc, qui peut à présent être posé à l'endroit, retrouve son volant moteur, au préalable rectifié.

 

 

 

Un joint de culasse de fabrication moderne est mis en place, puis la culasse posée et serrée au couple.

 

 

 

Un gros travail s'annonce au niveau de la culbuterie, très spécifique, et du remontage de la distribution.

Fort heureusement, nous sommes parvenus à nous procurer un arbre à cames d'origine neuf. Cela permet d'éviter une retaille de l'ancien arbre à cames, opération toujours délicate.

Les culbuteurs ont quant à eux été surfacés, afin de redonner une surface d'appui parfaite avec la queue de soupape.

 

 

 

Après avoir soigneusement nettoyé les deux demi rampes de culbuteurs, l'arbre à cames et le support central, nous reposons le tout sur la culasse.

 

 

 

Une chaine et des pignons de distribution neufs sont montés, et la distribution calée.

Les culbuteurs peuvent alors être réglés, ce qui clôture les travaux de remontage du moteur.

 

 

 

 

 

 

 

 

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Réfection et montage des périphériques :

 

 

 

Nous nous attelons à présent aux périphériques. C'est une phase importante de toute réfection moteur.

En effet, malgré une remise à neuf soignée, un moteur ne fonctionnera jamais de manière satisfaisante si ses périphériques sont défecteux !

Allumage défaillant, carburation hasardeuse, prises d'air, sont autant de sources possibles de défauts de fonctionnement.

 

 

Le collecteur d'échappement, après avoir été décapé à l'acide et repeint, retrouve ainsi sa place.

Joint neuf et écrous en cuivre sont utilisés pour le montage.

 

 

Le collecteur d'admission est quant à lui trop endommagé pour être conservé, une partie de sa partie inférieure est brisée.

Nous parvenons à trouver un collecteur d'occasion en bon état, qui peut être décapé et repeint, de la même manière que le collecteur d'échappement.

Il est alors reposé sur la culasse sur des joints neufs.

 

 

La réfection de l'allumeur est primordiale: la qualité de l'étincelle, et surtout le déploiement correct de la courbe d'avance, sont des paramètres qui ne supportent pas l'à peu près.

L'allumeur est donc totalement démonté, afin de bien nettoyer sa mécanique interne et assurer un mouvement libre, et sans jeu, des masselotes d'avance centrifuge.

Notons au passage que la plupart des autos de cette époque ne disposaient pas encore de ce dispositif "automatique", l'augmentation de l'avance à l'allumage était bien souvent assurée par un réglage manuel au tableau de bord !

Une fois l'allumeur rénové, la bague de l'axe a été remplacée, il est passé au banc pour contrôler la courbe.

Tout va bien, le remontage est donc effectué et le point d'avance réglé.

 

 

Comme l'allumage, une carburation de qualité est indispensable à un fonctionnement optimal et agréable du moteur.

Un démontage complet est effectué, puis les divers éléments sont nettoyés aux ultrasons. Les plans de joints, de cuve et de pied, sont repris afin d'obtenir une planéité parfaite.

Un jeu important est a déplorer au niveau de l'axe de papillon.

Un axe neuf est donc fabriqué en légère surcote, et le corps du carburateur réalésé.

Ce carburateur est comme neuf, prêt à être reposé.

 

A suivre...

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